Pour dominer l’art de la dissertation, un secret : s’approprier la
théorie et développer la pratique. Voici en 5 points, des conseils de
méthode essentiels pour maîtriser l’art du sujet, de la problématique,
de la concision, de l’ajout d’éléments omis et de la qualité de la
langue...
1. Le sujet : un cap à circonscrire
Au début est le sujet… Il est impératif de prendre 5 à 10 minutes
pour lire précisément le sujet et en comprendre les tenants et
aboutissants. Chaque terme de l’énoncé compte. Un sujet comme « les
Français et le monde depuis 1914 » ne relève pas des mêmes enjeux que «
les Français dans le monde depuis 1914 ».
Également, interrogez-vous sur l’intérêt du sujet : est-il lié à
l’actualité récente, à un sujet de société ? Enfin, faites « parler » le
sujet ; « questionnez »-le. Par exemple quelles sont les questions que «
contient » le sujet et qui vous viennent à l’esprit ? Connaissez-vous
des auteurs qui ont écrit dessus ? Quels sont les principaux courants de
pensée ou arguments qui s’opposent sur ce sujet ?
Des sujets notionnels, ou « sujets secs » nécessitent, dès
l’introduction, un effort de définition particulièrement soigné : les
adverbes interrogatifs « qui ? », « quoi ? », « quand ? », « où ? », «
pourquoi ? », « comment ? » vous aideront. Des sujets relationnels,
reconnaissables à la conjonction « et » qui apparaît fréquemment dans
leur énoncé, vous invitent à étudier la nature des liens qui unissent
les notions en présence. Les sujets chronologiques, plus classiques en
apparence, peuvent vous conduire à devoir fixer des bornes
chronologiques dont le correcteur appréciera la pertinence.
Quel que soit le type de sujet, tout dans votre devoir doit y être
directement rattaché. Il sera votre fil d’Ariane, le cap dont vous ne
devez pas dévier.
2. La problématique : une bonne mise en perspective
L’élaboration de la problématique constitue l’étape cruciale du
devoir. Une bonne dissertation est essentiellement la réponse argumentée
à la problématique que vous aurez posée. La problématique peut aussi
bien consister en une question fermée, qui n’appelle de réponses que «
oui » ou « non », ou une question ouverte, qui se caractérise par un
champ de réponses possibles plus étendu. Écartez d’emblée les fausses
problématiques, qui se contentent de répéter l’énoncé, ainsi que les
problématiques hors-sujet.
Dans l’introduction, la définition des termes du sujet pose les
premiers jalons de la problématique. Pour vous aider, songez aux
articulations logiques entre, d’une part, les notions posées par le
sujet et, d’autre part, des éléments d’analyse ou de perspective
historique relatifs aux grandes mutations économiques, sociales ou
politiques concomitantes. En particulier celles intervenues depuis le
commencement de la révolution industrielle : évolution de la démocratie,
évolution du rôle de l’État dans la sphère économique et sociale,
internationalisation des économies, transition démographique, révolution
des transports, exode rural, déversement intersectoriel au sens
d’Alfred Sauvy, « rationalisation » du monde au sens de Max Weber, etc.
3. La concision : allez à l’essentiel
La concision doit être une constante pour les candidats. Elle
consiste à exprimer beaucoup… en utilisant peu de mots. L’équation «
e=mc² » en est une excellente illustration. Pareillement, votre propos
doit être dense, serré, ramassé. Visez la densité, ne délayez pas. Il
vous faut chercher les termes, les expressions les plus appropriés pour
traduire exactement l’idée ou le raisonnement que vous souhaitez
formuler.
Pour vous préparer, lisez par exemple le Journal d’André Gide (« Bu
du lait à cinq heures. »), les poèmes de Wislawa Szymborska (« Un poète
lit ses poèmes à des aveugles. Il ne pensait pas que ce serait si
difficile. Sa voix se trouble. Ses mains tremblent. » in « Les Aveugles
»), ou encore les romans et nouvelles d’Ernest Hemingway, qui
conseillait à un ami voulant écrire : « Ce qu’il faut, c’est écrire une
seule phrase vraie. Écris la phrase la plus vraie que tu connaisses. ».
Le style d’Hemingway est essentiellement factuel et composé de
dialogues. Il use de très peu d’adjectifs et d’adverbes.
4. Savoir insérer des éléments omis
Que faire en cas de nécessité d’ajout au milieu d’un texte déjà écrit
d’éléments omis ? Dans tous les cas, ne vous engagez pas dans un
chantier « effaceur » sur plusieurs lignes, encore moins à base de blanc
correcteur. S’il s’agit de quelques mots, indiquez-les proprement entre
deux lignes, en précisant par un « V » où ces mots doivent
s’intercaler.
S’il s’agit de deux à trois lignes et si vous avez
suffisamment de place en bas de la page — soit parce que la marge est
grande, soit parce que vous n’êtes pas encore arrivé en bas de la page
—, tracez un trait horizontal à quatre centimètres au-dessus du bord de
la feuille et écrivez dans l’espace ainsi dégagé en faisant dans le
corps du texte un renvoi propre et lisible en bas de page par un
astérisque.
S’il s’agit de deux à trois lignes et que vous n’avez
pas suffisamment de place en bas de page ou vous êtes déjà passé à une
autre page, ou si le passage à ajouter est trop long pour que la
solution en bas de page soit correctement admissible, faites un renvoi
clair vers un intercalaire ou un feuillet joint en annexe et intitulé
Addendum sur lequel vous préciserez qu’il s’agit d’un complément à la
page n. Par souci de compréhension, de clarté et de simplicité, vous
écrirez uniquement ces éléments sur ce feuillet.
5. La qualité de la langue : l’art de gagner (ou ne pas perdre) des points
La maîtrise de la grammaire et de l’orthographe est une condition
nécessaire mais non suffisante du succès : ce n’est pas parce que vous
écrirez sans faute que vous serez reçu (hélas…). En revanche, il est
acquis que vous ne le serez pas si vous souffrez de graves lacunes dans
ce domaine. Deux ou trois fautes mineures tout au plus seront tolérées
dans une copie ; au-delà vous serez sanctionné, indépendamment de la
qualité intellectuelle de votre travail. Le fond n’a plus aucune
importance lorsque la maîtrise de la langue n’est pas assurée.
Soignez également votre graphie. Aux concours, plusieurs points
peuvent être retranchés à votre note en cas d’orthographe défaillante ou
de graphie illisible. Il est fréquent que des correcteurs interrompent
la lecture d’une copie qui comporterait un trop grand nombre de fautes
d’orthographe. Pareille mésaventure, si elle devait vous arriver, vous
garantirait une note extrêmement basse.
Aussi, il est impératif de
consacrer 10 minutes à la relecture du devoir à la fin de l’épreuve,
même s’il est possible de ne pas avoir très envie de relire le devoir
que l’on vient d’écrire. Ces dix minutes doivent être
« sanctuarisées » : vous pouvez jouer là jusqu’à deux ou trois points.
Soyez attentif aux mots manquants ou mal écrits, aux fautes
d’orthographe, à la ponctuation douteuse, aux accents approximatifs que
certains correcteurs sanctionnent, estimant que le candidat a voulu
dissimuler son ignorance du bon accent. N’employez un terme que si vous
êtes certain de maîtriser son sens et de son orthographe ; si vous avez
un doute, cherchez un synonyme.
Idéalement, procédez à deux
lectures : une lecture pour vous attacher à l’expression écrite et au
style de votre devoir, une lecture pour examiner le fond du propos. Une
lecture supplémentaire n’est jamais un luxe. Comme un sculpteur,
peaufinez.
Bon courage à tous !
* Par Nicolas Guerrero, avocat au barreau de Paris et auteur de Systèmes politiques et histoire des idées (Studyrama, 2012)
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